Berlin – le passage du temps / 8/02/2014

Jeudi et vendredi dernier, le mixage du son de l’installation a eu lieu avec Luc Boudrias aux studios de Vision Globale à Montréal. Ce furent deux journées absolument passionnantes. C’est un mixage qui, à l’image du montage sonore lui-même, présentait des difficultés singulières. Nous n’avions évidemment pas le choix de mixer les quatre bandes une par une mais ce faisant, à cause de la structure même de l’installation, nous ne pouvions pas entendre l’intégralité de ce qui allait se présenter aux oreilles des spectateurs. Jamais les bandes ne seront entendues séparément, une par une, il s’agira toujours de l’addition de quatre bandes différentes qui en plus seront dans une relation toujours différente. En réalité, il faudrait 1120 années pour que les quatre boucles retrouvent leur état initial. Entretemps, la combinaison des sons sera constamment différente et en constante transformation.Il s’agissait donc d’un travail à l’aveuglette où il fallait essayer d’imaginer sans entendre ce que pouvaient être tout le spectre des combinaisons possibles entre les quatre boucles. Au niveau du montage sonore, pour chacune des boucles, une grande économie était nécessaire afin de laisser de l’espace sonore pour les éléments variables qui allaient venir des trois autres sources. Ainsi il était important de laisser des moments de calme et même de silence total, le risque étant qu’à certain moment il y ait une totale saturation sonore sur une durée trop longue. Comme il s’agissait dans tous les cas de tournage extérieur où on entendait la rumeur de la ville et le bruit de la circulation, il y avait un danger particulier d’une addition insupportable de son d’ambiance, trafic + trafic + trafic + trafic … Il était donc crucial d’éviter autant que possible les sons d’ambiance continus et de construire le son par événements ponctuels quitte à rompre avec le réalismes et d’accepter des moments de calme ou de silence en imaginant qu’ils allaient être comblés par les trois autres bandes. En fait, il était assez difficile de saisir ce qui pouvait favoriser au bout du compte un résultat global satisfaisant.

Outre le fait de travailler par événement sonore et d’éviter les ambiances, il semblait nécessaire que les bloc principaux, dont chacune des bandes sont contituées, soient de longueurs inégales et que des segments nettement plus courts soient intercalés entre les segments plus longs. Ce mode de construction m’apparaissait favoriser une plus grande mobilité, une plus grande variétés et de plus grand écarts dynamiques au niveau de la construction sonore globale en évolution constante générée par l’installation. Nous avons donc mixé bande par bande en essayant de se faire une image mentale de l’intégration avec tous les autre éléments possible absents et en portant une attention particulière aux «masse grises» des sons d’ambiance. Il fallait évidemment se prémunir de l’attitude réaliste qui aurait consister à juger du mixage selon l’image que nous avions sous les yeux. Lorsque les quatre boucles furent mixées, nous les avons copiés à la suite un grand nombre de fois sur quatre pistes et nous avons fait une écoute assez longue (uniquement sonore car il n’était pas possible d’avoir quatre images en même temps) de l’enchaînement simultané des quatre boucles de longueurs différentes. Et nous avons ensuite fait quelques corrections. Inutile de dire que tout ça fut assez exhaltant.

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