Seule La Main… (performances)

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VIDEO, en anglais (Vancouver).

VIDEO, en français (Beirut).

VIDEO, en italien (Macchiagodena).

VIDÉO, tournage de la performance à trois écrans à Macchiagodena, Italie.

VIDEO, en Ojibway (Winnipeg).

VIDEO, en Innu (rehearsal).

VIDEO, en langue arabe (Beirut).

VIDEO, installation vidéo à La Cinémathèque québécoise.

IMAGES FIXES tirées de diverses performances.


 

La performance Seule la main… a commencé à Vancouver en février 2007 à l’occasion d’une visite au Emily Carr Institute of Art and Design pour rencontrer des étudiants en cinéma d’animation. Une soirée image/musique fut organisée à cette occasion par le groupe Computational Poetics au cours de laquelle je devais faire une improvisation à quatre main avec Aleksandra Dulik et un duo avec le musicien Stefan Smulovitz. Pour ce duo, j’ai choisi de travailler à partir d’un texte que mon ami français Hervé Joubert-Laurencin, éminent spécialiste de Pasolini et du cinéma d’animation, avait attiré à mon attention : Seule la main qui efface peut écrire la vérité.

Hervé savait fort pertinemment que cette phrase m’intéresserait à plusieurs titres : à cause de son caractère paradoxal, à cause de sa mise en situation du geste d’effacer, qui était alors devenu un élément essentiel de mes performances d’animation en direct. Il avait pris connaissance de «la phrase» au cours d’une conférence du professeur Carlo Ossola. Sans entrer dans les détails, il s’agit d’une phrase attribuée, de façon probablement apocryphe, au mystique Rhénan Maître Eckhart. De toute façon, l’idée d’associer effacement et vérité circule depuis fort longtemps, on en trouve des traces sous différentes formes, dans les Évangiles, chez Dante et ailleurs.

Au-delà des implications mystiques de cette phrase, ce qui m’intéresse avant tout c’est son rapport précis avec mon processus de travail en animation improvisée, dessiner et effacer de façon cyclique : le mouvement animé ne peut apparaître que par l’effaçage. La phrase m’intéresse aussi parce qu’elle lie la question de la vérité à des activités physiques qui mettent le corps en action, qui supposent des gestes, à savoir écrire et effacer et non seulement «dire la vérité», bien que le langage reste nécessairement toujours impliqué comme substrat. Il m’a semblé que l’impossibilité d’attribuer cette phrase à aucune source certaine m’autorisait à l’investir d’un sens qui me convienne, ce sans nécessairement écarter toutes les interprétations possibles, repérables dans sa longue histoire.

J’ai donc fait cette performance d’abord en anglais («Only the hand that erases can write the true thing’»). Je l’ai repris plusieurs fois par la suite en français (à Toronto, à Beyrouth, à Montréal et à Chicoutimi). À Beyrouth, j’ai regretté de ne pas l’avoir fait en langue arabe. Cependant, à cause de mon ignorance de l’écriture arabe, cela aurait demandé trop de préparation et d’exercices pour être réellement possible pendant un court séjour. Néanmoins, faute de l’avoir fait cette fois là dans une autre langue, j’ai résolu de saisir toutes les occasions pour faire cette performance dans le plus grand nombre possible de langues. C’est devenu un projet. L’objectif d’associer à l’austère mystique de l’effacement portée par la phrase le foisonnement de toutes les langues de l’humanité rajoute une autre couche de paradoxe et donne une valeur moins unilatérale à l’entreprise : que pour advenir la vérité doive non seulement passer l’épreuve de l’élimination du superflus mais doive également s’engager dans la répétition infinie dans tous les idiomes de l’humanité.

La performance Seule la main… est ainsi devenue non seulement une célébration de la multiplicité des langues mais aussi la célébration du fait que la traduction soit possible.

J’avais d’abord pensé que l’édition d’un coffret DVD reproduisant des captations de toutes les versions serait le terme du projet, mais un tel objet aurait été absurde, invisionnable. Au bout du compte, j’en suis venu à penser que la diffusion simultanée de différentes versions, qui permette de créer un ensemble plastique et dynamique plus vaste, serait beaucoup plus intéressante que la simple collection de différentes versions sur un support DVD. Ce qui rend cela possible et visuellement intéressant, c’est que toutes les performances ont la même structure (définie par l’organisation interne de la phrase et de la musique de Stefan Smulovitz, qui est toujours la même), par contre elles sont toutes différentes dans le détail de leur «timing» et de leur construction dynamique et plastique. Lorsque c’était techniquement possible, j’ai donc commencé à faire la performance sur trois écrans (deux versions antérieures diffusées sur les écrans latéraux et la nouvelle au centre). C’était déjà le début de la transformation de la simple performance en projet d’installation vidéo.

Cette démarche aboutit en décembre prochain à la Cinémathèque québécoise avec la présentation d’une première version de l’installation vidéo Seule la main… qui regroupera 12 versions en autant de langues différentes, captées pour la plupart lors de performances dans des pays ou des lieux qui avaient à voir avec chacune de ces langues. Idéalement, je cherche à faire les performances dans des pays ou ces langues sont parlées et devant des locuteurs de ces langues. Cela n’est pas toujours réalisable, mais j’y arrive dans la plupart des cas. Je m’autorise également à reprendre en atelier une performance lorsque je suis insatisfait de ce que j’ai fait devant public. Il n’y a pas de plan, je profite simplement de mes voyages pour multiplier les performances. Parfois aussi, je suis invité spécialement pour faire cette performance. C’est une sorte d’errance à travers les continents. C’est évidemment un projet interminable. Particulièrement du fait que j’ai commencé à m’intéresser aux patois et aux langues parlées par très peu de gens ou même en voie de disparition.

Donc, après l’avoir fait en anglais et plusieurs fois en français, je l’ai fait en italien en mai 2008 dans le village de Macchiagodena, dans les montagnes à 200 km de Rome puis à ZOCulture à Catania en Sicile (Solo la mano che cancela puo scrivere la verita). Le 29 janvier 2009, j’ai présenté Seule la main… en Néérlandais (en Flammand plus précisément) au Vooruit à Gand : Enkel de hand die uitwist kan de waarheid schrijven, le 5 janvier en yiddish à Paris au théâtre de la Vieille grille («Nor di hant vos ken oysmenk di ken shraybn dem emes») puis le 7 février en Portugais à la Faculdade de Belas Artes de Lisboa (FBAUL) à Lisbonne: «Só a mão que apaga pode dizer a verdade», le 14 février, à Vancouver en lakota (langue amérindienne, «Nape kin lece hena pajuju wowicake he okihi owa»). À cette occasion, presque exactement deux ans après la première performance, la pièce a été faite de nouveau avec de la musique «live» de Stefan Smulovitz et Vivianne Houle. Le 23 avril 2009, je l’ai présenté en paiute, une langue amérindienne parlée au Nevada («Emi kaahemá katoo myuk’u, key hemá nomy yow qua»), à l’Université de Californie à Davis. En septembre 2009, je l’ai refait en yiddish au théâtre de La Vieille Grille, à Paris, puis en romanesco («Solo a mano che cancella po scrive a verita») au Club INIT, à Rome, et en romagnolo («Sol la man c’la scanzèle po scrivar la vérité») à Area Sismica à Meldola. Le 30 octobre, je la ferai en Ojibway («mininj eta gaa-gaasii’ang odaa-ozhibii’aan debwewang»). Je dispose donc maintenant de 11 langues, la douzième, la langue innu (muku mititshi ka kashinimatshet tshi ui uitam tapueunu), fera l’objet d’une performance à la Cinémathèque le 4 décembre prochain et sera immédiatement insérée dans l’installation.

Mise à jour: En octobre 2010, j’ai fait une version serbe (Samo Ruka…) à BanjaLuka en Bosnie et une version néerlandaise (Alleen de hand…) à Utrecht aux Pays-bas et, en mai 2011, une version arabe au festival Beirut Animated. Ce qui fait 15 versions différentes.

fiche technique

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